Passionné par les milieux humides et estuariens, Sylvain Duvanel emmène depuis 14 ans les visiteurs à la découverte de la Baie de Somme où il évoque tout à la fois la faune, la flore, l’histoire, la géographie, la géologie, l’économie locale. Notre guide nous attend au pied du phare du Hourdel. Derrière lui, un paysage à couper le souffle : la vaste étendue de la Baie de Somme, ses bancs de sable, ses miroirs sur l’eau, ses cieux immenses qu’a si bien décrit Colette qui passa quelques étés au Crotoy : « La baie de Somme, humide encore, mire sombrement un ciel égyptien, framboise, turquoise et cendre verte.»
Un site rythmé par les marées
Une beauté qui ne doit pas masquer les dangers de ce site où l’amplitude des marées peut atteindre plus de 10 mètres et la mer remonter à 14 km/heure. « 3h30 avant la pleine mer, il faut avoir quitter le sable. Ce n’est pas vous qui allez à la rencontre de la mer, c’est elle qui vient à votre rencontre, avec le risque que cela comporte », prévient notre guide. Ici, le paysage est en perpétuel mouvement : « Le fleuve Somme se jette à Saint-Valery-sur-Somme mais poursuit sa course folle sur 14 km. Le chenal peut se déplacer de 700 mètres par mois sur toute sa longueur. On est dans un milieu complètement sauvage. On parle de migrations des oiseaux, des bancs de sable, des galets.» Seul un blockhaus de la Seconde guerre mondiale, comme échoué sur la rive, témoigne du passage de l’homme.
Plus de 800 phoques à observer
En fin connaisseur des courants, Sylvain Duvanel nous fait traverser les eaux pour rejoindre les bancs de sable et observer les phoques. Il y a les veaux-marins - la colonie la plus importante de France qui vit ici à l’année - et les phoques gris qui rejoignent l’Europe du Nord en automne : « C’est un opportuniste. Ce n’est pas son lieu de prédilection, il préfère les zones avec des rochers pour se reposer mais il a trouvé sa cantine. Il mange en moyenne 2,5 kilos de poissons : soles, limandes, carrelets…».
Une période de naissance
Notre guide installe sa longue-vue : « Je vous assure que vous allez voir leurs moustaches. On n’est pas venu pour vendre du muguet », assène-t-il. Dans le viseur, un phoque qui fait ce qu’il préfère : se prélasser sur le sable, stockant la vitamine D et la graisse nécessaires à sa survie. Soudain, comme un seul homme, des centaines de phoques se jettent à la mer dans un impressionnant bruit de vagues : « Étonnant, sans doute un drone », lâche le guide. Les mammifères n’aiment pas trop le dérangement surtout pendant cette période de naissance entre la fin juin et début juillet où l’on dénombre entre 50 et 80 nouveaux-nés. La population croit ainsi chaque année pour atteindre aujourd’hui plus de 800 phoques.
Sandrine Bavard.